Depuis qu'il a entrepris des négociations avec les syndicats, le gouvernement dit vouloir tenir compte de la pénibilité des métiers pour d'éventuelles mesures appropriées : c'est une démarche dictée par le bon sens , tant il est évident que tous les métiers ne sont pas équivalents en termes de pénibilité. Un ouvrier qui manie le marteau piqueur régulièrement, celui qui porte régulièrement de lourdes charges imposent effectivement à leurs corps des fatigues réelles et mesurables. Tout cela est connu mais dès qu'on passe du physique au mental tout se complique, les mesures deviennent aléatoires, incertaines voire impossibles.
Un enseignant dans un collège de ZEP de la banlieue d'une grande ville(ou d'une plus petite)qui fait face chaque jour à des classes turbulentes ou hostiles, peuplées de gosses souvent agressifs et rétifs à toute éducation scolaire, doit déployer une énergie physique et intellectuelle considérable s'il veut "tenir" sa classe,il aura souvent le sentiment de ne servir à rien, alors qu'un professeur en classe terminale de philosophie a devant lui un public choisi, sélectionné beaucoup plus attentif et intéressé; son travail en sera facilité, la décontraction sera plus grande et le plaisir d'enseigner, de dialoguer sera au rendez-vous!
Où mettre le curseur pour séparer le pénible du "pas pénible"? Je n'en sais rien et je crois que le gouvernement lui-même éprouve bien des difficultés. Est-ce vraiment mesurable en dehors de certains cas objectivement pénibles?
Par contre, ce dont je suis certain ,c'est que les salariés et les syndicats se sont lancés dans une sorte de compétition assez ridicule où chacun affirme que son métier est le plus pénible, où chacun veut tirer la couverture à soi et l'autre jour j'entendais sur France Inter un représentant des "croquemorts" souligner combien son métier était pénible, parce que la fréquentation quotidienne de la mort, du chagrin des familles était d'un poids moral certain ! Qu'en pensent les urgentistes qui voient mourir quotidiennement des malades ou des blessés irrécupérables? Qu'en pensent les médecins légistes? les pompiers et sauveteurs de tout poil ? Les chirurgiens???...etc
On pourrait gloser longtemps, comparer ce qui n'est pas comparable, mesurer ce qui n'est pas mesurable et on n'arrêterait pas de tourner en rond stérilement.
Alors rappelons des évidences: tout travail ,quel qu'il soit, est source de fatigue ...mais toute fatigue est acceptée dès lors que l'on aime son travail et qu'on l'a choisi.Si l'on exerce un métier que l'on aime et qu'on a choisi, on sait qu'il aura ses difficultés, ses moments de lassitude voire de déception mais on sait aussi qu'il offrira bien des joies, des réussites et c'est précisément ce mélange de négatif et de positif qui en fait toute la richesse et la dynamique et qui donne un sens à la vie.
Par ailleurs, tout dépend aussi de l'attitude du salarié face à la tâche à accomplir ! Lorsque je vais au supermarché, j'observe des comportements différents significatifs. Il y a l'hôtesse de caisse souriante qui accueille le client, échange quelques mots cordiaux, quelques banalités, plaisante un peu et il y a celle qui dit à peine bonjour, qui "exécute" son travail, aucune sympathie, aucune empathie n'est manifestée. On retrouve ceci un peu partout, chez le pharmacien, chez le médecin, chez l'employé des postes ou de la SNCF comme à l'hôtel des impôts...etc
Il y a ceux qui donnent une âme à leur travail, qui l'humanisent, qui en font une source de liens avec les autres et il y a ceux qui ne sont que des exécutants: ceux-ci ne sont pas heureux, se fatiguent exagérément, ceux-là allègent leur tâche quotidienne en l'aimant.
Simpliste? Non, je ne crois pas!
Tout homme a la capacité, s'il le veut, de donner un sens à son travail, donc à sa vie. Si on est malheureux au travail, cela se répercutera sur la vie privée qui sera peu à peu abîmée ou détruite, si l'on est heureux au contraire la vie privée en bénéficiera. Le travail ne saurait être une parenthèse que l'on subit pour donner son énergie à la vie privée. L'un et l'autre seront toujours étroitement liés, indissociables.
Alors soyons les acteurs de notre bonheur et retroussons les manches!!